8 janvier 2018 | Silver Spring, Maryland, États-Unis | Marcos Paseggi, Adventist Review
« Les Adventistes du Septième Jour ne sont pas des fondamentalistes, » a déclaré Nicholas Miller, professeur d’Histoire de l’Eglise à l’Université d’Andrews, lors de l’ouverture de la session plénière de la conférence « Situer l’Histoire Adventiste » le 8 janvier sur le campus de l’Université Adventiste de Washington à Takoma Park, dans le Maryland aux États-Unis. Le programme de l’Association des Historiens Adventistes du Septième jour, sponsorisé par le Bureau des Archives, des Statistiques et de la Recherche et par l’Université Adventiste de Washington, a réuni des dizaines d’historiens Adventistes du Septième Jour, des chercheurs et des professeurs pour deux jours de présentations, de sessions de questions et réponses, et de discussions.
La présentation de Nicholas Miller, intitulée « l’Adventisme, le Fondamentalisme et la Bible, » a apporté des preuves historiques qui montrent comment l’adventisme, tout en étant un mouvement conservateur, a en grande partie pu éviter certains pièges fondamentalistes, adoptant une approche plus équilibrée pour diverses questions, y compris l’inspiration des Saintes Écriture. C’est quelque chose, a dit Nicholas Miller, qui est enraciné dans les idées qui ont influencé les débuts de l’histoire de la dénomination, quelque chose qui souligne l’importance de la recherche sur l’histoire Adventiste.
Pourquoi les Adventistes devraient-ils se soucier de l’Histoire
C’est aussi l’avis de David Trim, le directeur des Archives, des Statistiques et de la Recherche pour l’Eglise Adventiste du Septième Jour au niveau mondial. Dans ses remarques d’ouverture, il a déclaré que bien que les recherches dans le domaine de l’histoire de l’Eglise Adventiste aient explosé au cours des dernières décennies, il est essentiel d’établir un contexte pour beaucoup de ces études. « L’histoire Adventiste est en train d’être transformée, » a-t-il indiqué, « mais il nous faut contextualiser, placer les choses dans un contexte plus large, » a-t-il dit.
Pourquoi ? Dans une interview donnée en marge de la conférence, David Trim a expliqué que pour se comprendre, il est essentiel que les Adventistes du Septième Jour soient conscients des forces qui ont fait d’eux ce qu’ils sont aujourd’hui, et comment certaines de ces forces influencent encore leur façon d’agir et les décisions qu’ils prennent. « [Les Adventistes] n’existent pas dans le vide, » a-t-il dit. « [Ils] font partie d’un ensemble spécifique de circonstances géographiques et historiques qui affectent leurs plans et projets, même la façon dont ils voient leur mission. »
Loin du Fondamentalisme
A cet égard, la présentation de Nicholas Miller a mentionné certaines des idées qui apportent des éléments de contexte et qui ont influencé l’adventisme à ses débuts. Il a spécifiquement fait référence à trois notions qui, selon lui, ont façonné la pensée des pionniers Adventistes. « Les pionniers ne croyaient pas que des preuves absolues étaient nécessaires pour comprendre la vérité. Ils croyaient dans le rôle joué par leur jugement pour comprendre la vérité, » a-t-il dit dans un premier point.
Nicholas Miller a également expliqué que contrairement aux fondamentalistes, les pionniers Adventistes, y compris la co-fondatrice de l’église, Ellen G. White, pensaient que la compréhension de la vérité était basée sur la Parole de Dieu, mais qu’il était également possible d’obtenir d’importantes connaissances à partir du « livre de la nature, » et aussi en voyant Dieu à l’œuvre dans la vie des humains. » C’est quelque chose, a-t-il dit, qui a permis aux pionniers Adventistes d’arriver à des conclusions différentes de celles d’autres fondamentalistes chrétiens sur des sujets tels que le châtiment éternel, la possibilité pour les femmes de parler à l’église et l’esclavage, pour ne citer que ces exemples.
Enfin, les premiers Adventistes ont été influencés par la notion du gouvernement moral de Dieu en tant que présupposition en matière d’interprétation, ce qui, selon Nicholas Miller, amène à considérer les versets bibliques problématiques à travers la lentille de la bonté de Dieu. « Ainsi, par exemple, lorsque la Bible parle du feu éternel, » a dit le professeur Miller, « les premiers Adventistes ont cherché des explications alternatives, puisque pour eux un Dieu bon ne punirait jamais Ses enfants pour l’éternité. »
« Tout cela fait de l’adventisme un courant religieux différent du fondamentalisme, » a-t-il dit.
Conservateur et Pragmatique
Nicholas Miller a discuté des tensions Adventistes historiques au sujet de l’idée d’inspiration, un élément sous-jacent de ce développement dynamique de la compréhension Adventiste. Alors que les fondamentalistes ont généralement défendu l’inerrance verbale des Saintes Écritures, –c’est-à-dire le fait que la Bible ne comporte aucune erreur quel que soit le domaine et quel que soit l’aspect considéré, –les Adventistes du Septième Jour, dans l’ensemble, n’ont pas souscrit à cette vision. « Les Adventistes du Septième Jour ont adopté une vision élevée des Écritures, mais ne croient pas en l’inerrance verbale de la Bible, » a-t-il dit. La même chose s’applique aux écrits d’Ellen White. Elle-même n’a pas soutenu cette théorie, a déclaré Nicholas Miller.
Après la mort d’Ellen G. White en 1915, son fils William White a essayé de maintenir en vie la vision qu’avait sa mère de l’inspiration, en s’opposant aux mouvements soutenant l’inerrance verbale, a déclaré Nicholas Miller. Mais le développement de la pensée Chrétienne libérale a encouragé les dirigeants Adventistes à se ranger du côté des fondamentalistes sur de nombreux sujets au cours des deux décennies qui ont suivi, et l’idée d’inerrance verbale s’est infiltrée dans l’église. « C’est quelque chose qui a fini par changer l’approche de l’église à propos des questions relative aux races et aux femmes, par exemple, qui jusqu’à présent avait été pragmatiquement progressiste. »
Actuellement, nous vivons à une époque d’internationalisme croissant dans l’adventisme, a déclaré le professeur Miller. « Dans ce contexte, nous avons une église conservatrice, mais à maintes reprises, elle a prouvé qu’elle n’était pas fondamentaliste, » a-t-il conclu.
Alec Ryrie, professeur et auteur à l’Université de Durham, en Angleterre, semblait être d’accord avec la thèse de Nicholas Miller. En discutant de la place de l’adventisme dans l’histoire Protestante, il a indiqué que l’adventisme avait évité les pièges qui ont coulé d’autres mouvements.
« Historiquement, les mouvements Protestants se méfiaient des gouvernements, — ils ont refusé de s’impliquer dans la politique, ou alors ont tout simplement ignoré le gouvernement, » a dit Alec Ryrie. « Mais les Adventistes du Septième Jour ont choisi une autre voie. Ils parlaient de voter et de participer au gouvernement. Et dans la Guerre Civile Américaine, tout en s’opposant à l’esclavage, ils ont exprimé leur opposition contre les deux côtés de la confrontation. »
La même chose s’applique lorsqu’il est question de pensée apocalyptique. Après que Jésus ne soit pas revenu sur Terre en 1844, les Adventistes ont évité de choisir d’autres dates ou de s’éloigner de la pensée apocalyptique. « Les Adventistes du Septième jour ont choisi une troisième option, » a déclaré Alec Ryrie, qui n’est pas membre de l’Eglise Adventiste lui-même. « Ils ont expliqué que la date était correcte, mais pas l’événement. »
Alec Ryrie croit que contrairement à d’autres dénominations, une partie du succès de l’Adventisme est qu’il a réussi à s’accrocher à la pensée apocalyptique sans devenir déséquilibré. « L’adventisme est essentiellement pragmatique, » a-t-il dit.
Traduction: Patrick Luciathe