Les intervenants au récent 16ème Dîner Annuel de la Liberté Religieuse qui a eu lieu à Washington D.C. ont lancé un appel clair à établir des passerelles de compréhension et à renforcer les réseaux afin de lutter contre l’intolérance religieuse et de promouvoir la liberté de conscience et de croyance. Le programme du 22 mai 2018, parrainé par l’Association Internationale pour la Liberté Religieuse (IRLA) et d’autres organisations, a réuni des dizaines de responsables de liberté religieuse, d’administrateurs et de défenseurs de la liberté religieuse au siège de l’Organisation des États Américains afin d’établir des réseaux, d’examiner les défis à la liberté de croyance, et de remettre des prix.
« Nous prenons souvent pour acquis la liberté dont nous jouissons dans ce pays, » a déclaré Orlan Johnson, le président du conseil d’administration de l’Association Nord-Américaine pour la Liberté Religieuse (NARLA), alors qu’il accueillait les participants. « C’est l’une des raisons pour lesquelles nous avons besoin de programmes comme celui-ci, pour nous rappeler les libertés dont nous jouissons. »
TLes Droits des Minorités et la Liberté Religieuse
L’intervenant principal de l’édition 2018 du programme dont le thème était « Défendre la Liberté de Conscience pour Tous, » était un défenseur turc de la cause, l’érudit et écrivain, Aykan Erdemir. Ce dernier, diplômé de Harvard et ancien membre du Parlement turc (2011-2015), est un défenseur connu du pluralisme, des droits des minorités et de la liberté religieuse au Moyen-Orient. En tant que tel, il a été en première ligne de la lutte contre la persécution religieuse, les crimes haineux et les discours de haine en Turquie et ailleurs.
Dans son allocution d’ouverture, Aykan Erdemir a souligné le rôle vital des constructeurs de ponts pour la liberté religieuse. « Il est essentiel que nous puissions sortir de nos communautés, que nous allions au-delà de nos zones de confort, vers les autres, » a-t-il dit. « Nous avons besoin d’institutions qui n’ont pas peur d’aller vers les autres. »
Dans le même temps, Aykan Erdemir a mis l’accent sur le fait que se tourner vers les autres ne signifie pas nécessairement abandonner nos croyances. « Aller vers l’autre ne signifie pas compromettre nos convictions et nos croyances, » a-t-il dit. « En fait, nous ne devrions pas abandonner nos valeurs fondamentales parce que reconnaître nos grandes différences est essentiel dans cette démarche qui nous amène à nous parler et à considérer la valeur les uns des autres. »
Lauréats Nationaux et Internationaux
Le dîner annuel a également été l’occasion d’honorer les efforts d’éminents défenseurs de la liberté de croyance et des droits religieux des minorités aux États-Unis et à travers le monde.
Le Prix National 2018 a été décerné à l’avocate général et directrice exécutive adjointe du Comité Conjoint Baptiste pour la Liberté Religieuse, Holly Hollman. Cette dernière, basée à Washington D.C., fournit une analyse juridique des questions relatives aux relations entre l’église et l’état qui se retrouvent devant le Congrès, les tribunaux et les organismes administratifs. Elle consulte régulièrement les églises, les individus et les organisations sur les questions de liberté religieuse.
« Holly [Hollman] est un bâtisseur de consensus, un bâtisseur de ponts, » a déclaré Melissa Rogers, ancienne directrice des partenariats confessionnels et de quartier à la Maison-Blanche, en présentant la lauréate. « Et elle est une chrétienne engagée qui croit que la liberté religieuse vient de Dieu. »
En acceptant le prix, Holly Hollman a souligné ces points et d’autres. « Honorer la liberté de conscience c’est honorer la création de Dieu, » a-t-elle déclaré. « Travailler pour la liberté religieuse nous relie à un large éventail d’expériences [et nous rappelle que] nous dépendons les uns des autres et de la capacité à se rassembler pour trouver un terrain d’entente. »
Le Prix International 2018 a été remis au vice-président du Parlement norvégien, Abid Q. Raja. Avocat de profession, Abid Raja a été le premier norvégien issu d’une minorité à recevoir la bourse d’études du Roi pour l’Université d’Oxford et est l’auteur de deux livres sur les thèmes de l’intégration et de la tolérance religieuse.
Pour Abid Raja, un musulman, l’intolérance religieuse a plus qu’une signification théorique. Ayant grandi en Norvège en tant qu’enfant de parents immigrés du Pakistan, il a vécu personnellement l’impact des stéréotypes raciaux et de la discrimination religieuse.
« La diversité n’est pas quelque chose que je considère comme acquis, » a-t-il déclaré en acceptant le prix.
La Contribution Adventiste
Plusieurs défenseurs de la liberté religieuse Adventistes ont souligné la contribution Adventiste à la discussion, grâce à l’engagement de longue date de la dénomination pour la liberté religieuse.
« L’Église Adventiste du Septième Jour a eu une longue et distinguée tradition de défense de la liberté religieuse pour tous, pas seulement pour les membres de l’église, » a expliqué le directeur des Affaires Législatives de l’Église Adventiste et agent de liaison avec le Congrès des États-Unis, Dwayne Leslie, à Adventist Review. C’est la raison pour laquelle, a-t-il dit, le parrainage d’événements comme celui-ci offre à l’église une occasion unique de « prendre la tête pour rassembler les leaders d’opinion et les responsables gouvernementaux afin de les informer et les équiper pour mieux protéger les principes de la liberté religieuse. »
Des programmes tels que le Dîner Annuel de la Liberté Religieuse sont également importants pour des raisons pratiques, a reconnu Dwayne Leslie, car l’église Adventiste peut mettre en lumière ses efforts en matière de défense de la liberté religieuse à Washington D.C. et ailleurs. « En tant que groupe religieux connaissant une des croissances les plus rapides dans le monde, l’Église Adventiste se retrouve souvent comme une minorité religieuse dans de nombreux pays, » a-t-il dit à Adventist Review. « Par conséquent, nous sommes particulièrement sensibles à la protection des droits des minorités religieuses et à la protection de la liberté de conscience pour tous. »
Pour le secrétaire général de l’IRLA, Ganoune Diop, qui dirige également le département des Affaires Publiques et de la Liberté Religieuse de l’Eglise Adventiste, le soutien qu’apportent les Adventistes à la liberté religieuse est encore plus profond puisqu’il repose sur une compréhension biblique du caractère de Dieu. « La liberté religieuse, c’est beaucoup plus que ce qui apparait à première vue, » a déclaré Ganoune Diop. « D’un point de vue confessionnel, elle est basé sur une caractéristique de Dieu. »
Ganoune Diop a poursuivi en expliquant que croire que les êtres humains ont été créés à l’image de Dieu implique de croire en la liberté de choisir. « La liberté religieuse reçoit sa valeur de l’amour, et l’amour ne peut être obtenu par la force, » a-t-il déclaré. « Le but de la liberté c’est l’amour. »
Le rédacteur en chef du magazine Liberty Lincoln Steed, qui a coparrainé le dîner annuel, est du même avis. Faisant référence à Thomas Jefferson, un des Pères Fondateurs Américains, il a partagé cette citation : « Le Dieu qui nous a donné la vie nous a donné la liberté en même temps. »
Défis Actuels et Opportunités
Les temps pour la liberté religieuse, cependant, sont complexes, a rappelé Ganoune Diop aux participants. « D’un côté, la liberté religieuse est considérée comme une liberté fondamentale, » a-t-il déclaré. « Dans le même temps, la liberté religieuse est soumise à une profonde déconstruction. Certaines personnes disent même que la liberté religieuse pourrait être un mot codé pour la discrimination, et selon certains critiques, c’est juste un moyen de subjuguer les gens dans les pays en voie de développement. »
De nouveaux développements appellent à de nouveaux efforts et de nouvelles initiatives dans le domaine de la liberté religieuse, ont indiqué des experts. L’une de ces initiatives est le Panel International de Parlementaires pour la Liberté de Religion ou de Croyance (IPPFoRB). L’organisation, qui a été fondée par un petit groupe d’élus en 2014, s’est transformée en un réseau informel de 130 parlementaires et législateurs du monde entier engagés dans la lutte contre la persécution religieuse et dans la promotion de la liberté de religion ou de croyance, tel que cela est défini dans l’Article 18 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme des Nations Unies. Aykan Erdemir et Abid Raja sont deux des membres fondateurs de l’organisation.
Parmi les nombreuses initiatives de l’IPPFoRB, il y a eu deux conférences internationales – à New York et à Berlin – et une vingtaine de lettres de plaidoyer écrites au nom des membres de l’IPPFoRB aux gouvernements de pays tels que le Vietnam, la Birmanie, la Corée du Nord et l’Indonésie.
Dans une réflexion partagée lors du diner de cette année, Dwayne Leslie a conclu en mettant l’accent sur l’objectif général du programme. « Bien que la situation de la liberté religieuse continue de se détériorer dans de nombreuses parties du monde, » a-t-il dit, « des programmes comme le Dîner de la Liberté [Religieuse] peuvent être particulièrement utiles pour établir de nouvelles connexions et des conversations … sur la façon de collaborer plus efficacement et d’accroître l’impact global du discours sur la liberté religieuse. »
Traduction: Patrick Luciathe